Idées reçues
La déficience visuelle est parfois difficile à comprendre et divers mythes ou fausses réalités peuvent se faire entendre à son sujet. L'objectif de cette partie du guide est de démystifier ces différentes croyances. En voici donc quelques exemples.
- Les personnes ayant une déficience visuelle entendent mieux que les autres.
Cette croyance est totalement irréaliste. Les personnes non voyantes n'ont pas une meilleure audition que les personnes voyantes. Leur perte visuelle entraîne un apprentissage et une utilisation accrue de leur autre sens. Cette limitation provoque le développement de leur attention auditive qui peut parfois compenser les indices visuels estompés.
- Lorsqu'on s'adresse à une personne ayant une incapacité visuelle, il est important de lui parler plus fort.
Il est inutile de parler fort lorsqu'on s'adresse à une personne aveugle; dans la majorité des cas, elle n'a pas de problème d'audition. Ce qui est important, c'est de s'assurer qu'elle sait que vous vous adressez à elle.
- Les personnes ayant une limitation visuelle peuvent vous reconnaître au son de votre voix, après ne l'avoir entendu qu'une seule fois.
Il est impossible pour une personne aveugle de reconnaître tous les gens qu'elle rencontre uniquement par leur voix, surtout si les rencontres sont occasionnelles. Même si certaines personnes vivant avec une déficience visuelle peuvent avoir une plus grande facilité à vous reconnaître, il est toujours important de prendre soin de se nommer pour s'assurer qu'elles vous ont bien identifié.
- Les personnes handicapées visuelles ont un 6e sens.
Le 6e sens que l'on attribue régulièrement aux personnes ayant une incapacité visuelle est l'écholocation (le moyen qu'utilisent les chauves-souris pour se déplacer). L'Être humain n'a pas ce sens; c'est l'utilisation des autres sens de façon plus soutenue qui compense la vision.
- Les personnes qui utilisent une canne blanche ont une cécité totale.
Il est faux de croire que les personnes utilisant la canne blanche sont toutes totalement aveugles. Au contraire, seulement 7 % d'entre elles le sont. Pour les autres, la canne blanche devient un outil améliorant leur sécurité lors des déplacements.
- Toutes les personnes handicapées visuelles lisent le braille.
Comme seulement 7 % des personnes handicapées visuelles sont reconnues fonctionnellement aveugles et que celles ayant un résidu visuel suffisant peuvent lire des informations écrites au moyen de caractères agrandis et/ou d'aide optique (lunette, loupe, télévisionneuse, etc.), il ne faut pas croire que toutes apprennent le braille.
- Les personnes aveugles n'utilisent pas les mots « voir », « lire » et « regarder ».
Les personnes ayant une déficience visuelle utilisent ces mots aussi régulièrement que les autres et pour les mêmes usages. Elles utilisent des expressions telles que : « As-tu vu ce qu'on annonce à la télévision ? », « As-tu lu le dernier livre de Marie Laberge ? », etc. Il ne faut pas cesser d'utiliser ce vocabulaire avec une personne ayant une limitation visuelle, car ces mots font aussi partie du sien.
- Les personnes vivant avec une déficience visuelle n'ont aucun intérêt à regarder la télévision ou à aller voir un film.
Même si elles ne peuvent distinguer les images, plusieurs regardent la télévision et vont voir des films. Leur intérêt pour ce genre d'activités dépend de leur personnalité, tout comme pour les personnes n'ayant pas de problème de vision. Il est certain qu'elles ont moins d'intérêt pour les émissions ou les films ayant beaucoup de séquences non verbales.
- Les personnes aveugles ont plus de mémoire que les autres.
Les personnes aveugles n'ont pas plus de mémoire, mais elles la gardent active et l'utilisent stratégiquement. On conseille souvent aux personnes âgées de faire des mots croisés afin de stimuler et de développer leur mémoire. Les personnes aveugles, elles, travaillent leur mémoire quotidiennement pour pouvoir fonctionner de façon autonome. Certaines personnes peuvent avoir une bonne mémoire et d'autres moins.
- Les personnes ayant une limitation visuelle pourraient porter des verres correcteurs pour corriger leur vision.
Les verres correcteurs sont utilisés pour optimiser au maximum les restes visuels. Par contre, la vue n'est pas corrigée totalement, car si tel était le cas, on ne parlerait plus de personnes ayant une limitation visuelle puisqu'elles ne correspondraient plus à la définition légale d'une personne handicapée visuelle.
- Les personnes ayant une déficience visuelle portent des verres fumés ou correcteurs pour camoufler leurs yeux.
Dans la plupart des cas, ce n'est pas l'esthétique qui motive le port de verres fumés ou correcteurs. Plusieurs personnes déficientes visuelles ont encore des perceptions et ces lunettes leur permettent d'utiliser leur résidu à son plein potentiel, par exemple pour lire. Ils sont aussi utilisés pour des situations d'éblouissements ou nocturnes. Ces verres peuvent aussi être portés pour des raisons d'inconfort (yeux secs, problèmes avec la climatisation, la ventilation, etc.).
- Les personnes totalement aveugles peuvent reconnaître l'argent papier à son épaisseur et à sa texture.
Il est faux de croire qu'on peut reconnaître les billets au toucher. Les nouveaux billets ont des indices tactiles, mais ceux-ci sont inutiles, car ils disparaissent très rapidement. La méthode utilisée pour identifier l'argent est l'utilisation d'un lecteur électronique de billets et/ou un rangement spécifique (portefeuille à compartiments, façon de plier les billets). Les personnes se fient régulièrement à l'honnêteté des gens ou utilisent des initiatives personnelles qui leur permettent d'éviter des fraudes.
- Les personnes avec une déficience visuelle ne peuvent pas utiliser un ordinateur et aller naviguer sur Internet.
Avec l'avancement de la technologie, les personnes aveugles sont en mesure d'utiliser un ordinateur régulier. Par contre, celui-ci doit contenir des logiciels permettant des grossissements de caractères, une synthèse vocale ou une plage tactile. La navigation sur Internet est encore très ardue, mais elle est possible. Afin que les sites soient totalement accessibles, ils doivent répondre aux normes de la « Web Accessibility Initiative ».
- Une personne déficiente visuelle qui utilise un chien-guide suit les recommandations de son chien avant de faire la traversée d'une rue.
Les chiens-guides ne peuvent distinguer la couleur des feux de signalisation. Ce n'est donc pas le chien-guide qui décide de traverser une rue, mais plutôt le maître qui choisit le moment opportun et demande au chien d'amorcer la traverse. Le chien lui permettra, par contre, d'être bien orienté et de traverser de façon à arriver sur le coin de la rue. Il contournera les obstacles au besoin et empêchera son maître d'avancer si un danger se présente.
Dès qu'il y est allé une fois, le chien-guide sait parfaitement où diriger son maître à l'intérieur d'un établissement. Une personne aveugle ne peut se fier totalement à son chien pour ses déplacements intérieurs. Elle doit avoir un aperçu de l'aménagement des lieux afin de donner de bons commandements à son chien pour se rendre à l'endroit désiré.
- L'absence de circulation automobile facilite la traversée des rues pour une personne déficiente visuelle.
L'absence de circulation automobile ne permet pas aux personnes ayant une limitation visuelle de se déplacer plus aisément. Au contraire, la circulation automobile leur permet d'avoir différents points de repère tels que l'approche d'une intersection, le moment opportun pour traverser les rues, le sens de la circulation, etc.
- Les personnes aveugles comptent leurs pas pour repérer l'endroit où elles sont.
Il est faux de croire que pour se déplacer, les personnes aveugles apprennent par coeur le nombre de pas pour chacun de leurs déplacements. Elles utilisent plutôt différents points de repère tels que les courbes, les descentes de trottoir, les dénivellations ou les objets distinctifs. Imaginez la mémoire nécessaire si chacun des déplacements était compté !
- Toutes les personnes ayant une déficience visuelle vivent les mêmes problèmes dans leur vie quotidienne.
Il est très important de savoir que toutes les personnes ayant une limitation visuelle ne vivent pas quotidiennement des problèmes semblables. Chacune d'entre elles a ses forces et ses faiblesses. Pour une personne, une situation peut être problématique, alors que pour une autre elle est banale. Chaque personne a son tempérament, ses compétences et ses aptitudes. Il faut éviter de prendre la déficience comme point de comparaison, et plutôt voir le potentiel de chacun.
(Source : Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec)